Vincenzo Aiello
đ€ CETTE SCĂNE QUI MâA MARQUĂ : LA VACHE ET LE PRISONNIER
Câest un autre film qui a bercĂ© mon enfance que je souhaite vous faire partager aujourdâhui.
Nous sommes en 1959 et cette année là sortait un film franco-italien réalisé par Henri Verneuil : La vache et le prisonnier.
Lâhistoire se passe en 1943 encore une fois durant la seconde guerre mondiale. Cette fois-ci, nous sommes avec un prisonnier de guerre français du nom de Charles Bailly, interprĂ©tĂ© par le formidable Fernandel, qui tente de sâĂ©vader avec lâaide dâune vache.
Pour la petite anecdote, ma grand-mĂšre, immigrĂ©e italienne, me racontait que lorsquâelle est arrivĂ©e en Suisse dans les annĂ©es 60, elle allait rĂ©guliĂšrement voir les films de Fernandel. Bien quâelle ne comprĂźt pas grand-chose, elle me disait quâil avait le don de la faire rire et pleurer en mĂȘme temps. Jâai toujours pensĂ© que câĂ©tait une jolie illustration de la capacitĂ© de notre art Ă provoquer des Ă©motions fortes.
La vache et le prisonnier constitue donc pour moi une jolie petite madeleine de Proust.
La scĂšne dont jâai dĂ©cidĂ© de vous parler aujourdâhui se situe peu aprĂšs le milieu du film. Notre prisonnier vient de vivre plusieurs aventures dans son pĂ©riple avec sa vache lorsquâun petit Ă©vĂ©nement cocasse lâamĂšne Ă prendre un repas dans une ferme avec une famille allemande.
Ce qui me marque toute suite, câest la rupture de ton avec la premiĂšre partie du film ou lâon est rĂ©guliĂšrement confrontĂ© Ă des moments de drĂŽlerie. Il y a dans cette scĂšne une authenticitĂ© qui se dĂ©gage entre les personnages. Au milieu de cette guerre, au milieu des massacres, elle montre que lâon reste des humains avec les mĂȘmes prĂ©occupations, les mĂȘmes peurs et la mĂȘme envie de tout simplement vivre.
Charles est accueilli dâabord froidement par le pĂšre de famille avant que la fille ne vienne servir de traductrice.
Durant la premiĂšre partie de la scĂšne, les parents sont en arriĂšre-plan tandis que Charles et la fille sont en premier plan pour montrer quâil y a une distance entre eux. Ils ne sont pas du mĂȘme camp et ils ne lui font pas confiance.
Jâaime beaucoup comment le cinĂ©aste nous confronte aux diffĂ©rences qui les sĂ©parent. Le sujet de la conversation Ă ce moment-lĂ , câest Marseille et câest une belle maniĂšre de montrer deux points de vue sur un mĂȘme sujet. Pour la famille Allemande, Marseille fait peur alors que pour Charles, câest le paradis.
Dans la deuxiĂšme partie de la scĂšne, nous sommes cette-fois autours de la table avec tous les personnages. La distance entre Charles et la famille sâest cassĂ©e. Ils partagent un repas et une complicitĂ© commencent Ă naĂźtre entre eux. Charles rĂ©ussi mĂȘme Ă leur faire partager une spĂ©cialitĂ© culinaire française.
Dans cette partie, la mĂšre prend Ă©galement une place toute particuliĂšre. Bien quâelle sâexprime peu, elle porte en elle la tristesse dâune mĂšre qui a perdu un fils et qui craint pour sa famille. Son personnage est trĂšs touchant.
Enfin, le final amené par le pÚre est drÎle et démontre bien à quelle point la guerre est une chose absurde.
Câest au final une trĂšs jolie scĂšne qui brille par sa simplicitĂ© dans sa mise en scĂšne. Cela permet selon moi dâappuyer lâauthenticitĂ© dâune rencontre entre deux mondes qui devraient se dĂ©tester mais qui finissent par partager un repas ensemble. Elle me touche Ă chaque visionnage.
Pour toutes ces raisons, lorsque je veux me rappeler pourquoi jâai souhaitĂ© faire du cinĂ©ma⊠et bien je regarde cette scĂšne et je me souviens.
Et toi ? Est-ce que cette scĂšne tâa marquĂ© ?
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